C’était une promesse du Président de la République en marge du « grand débat national », Emmanuel Macron a écrit une lettre à tous les français le dimanche 13 janvier 2019 dans la soirée. Il y décrit les 34 questions auxquelles il invite les français à répondre afin de transformer les colères en solutions.

1. Les impôts et la fiscalité

  • Comment pourrait-on rendre notre fiscalité plus juste et plus efficace ?
  • Quels impôts faut-il à vos yeux baisser en priorité ?

2. Le fonctionnement des services publics

  • Quelles sont les économies qui vous semblent prioritaires à faire ?
  • Faut-il supprimer certains services publics qui seraient dépassés ou trop chers par rapport à leur utilité ?
  • A l’inverse, voyez-vous des besoins nouveaux de services publics et comment les financer ?

3. Le modèle social français

  • Comment mieux organiser notre pacte social ?
  • Quels objectifs définir en priorité ?

4. Le fonctionnement et la place de l’État

  • Y a-t-il trop d’échelons administratifs ou de niveaux de collectivités locales? Faut-il renforcer la décentralisation et donner plus de pouvoir de décision et d’action au plus près des citoyens? A quels niveaux et pour quels services ?
  • Comment voudriez-vous que l’État soit organisé et comment peut-il améliorer son action? Faut-il revoir le fonctionnement de l’administration et comment ?
  • Comment l’État et les collectivités locales peuvent-ils s’améliorer pour mieux répondre aux défis de nos territoires les plus en difficulté et que proposez-vous ?

5. La transition écologique et environnementale

  • Comment finance-t-on la transition écologique : par l’impôt, par les taxes et qui doit être concerné en priorité ?
  • Comment rend-on les solutions concrètes accessibles à tous, par exemple pour remplacer sa vieille chaudière ou sa vieille voiture ?
  • Quelles sont les solutions les plus simples et les plus supportables sur un plan financier ?
  • Quelles sont les solutions pour se déplacer, se loger, se chauffer, se nourrir qui doivent être conçues plutôt au niveau local que national ?
  • Quelles propositions concrètes feriez-vous pour accélérer notre transition environnementale ?

6. La protection de la biodiversité

  • Comment devons-nous garantir scientifiquement les choix que nous devons faire à cet égard ?
  • Comment faire partager ces choix à l’échelon européen et international pour que nos producteurs ne soient pas pénalisés par rapport à leurs concurrents étrangers ?

7. Le fonctionnement des institutions et de la démocratie

  • Faut-il reconnaître le vote blanc ?
  • Faut-il rendre le vote obligatoire ?
  • Quelle est la bonne dose de proportionnelle aux élections législatives pour une représentation plus juste de tous les projets politiques ?
  • Faut-il, et dans quelles proportions, limiter le nombre de parlementaires ou autres catégories d’élus ?
  • Quel rôle nos assemblées, dont le Sénat et le Conseil Économique, Social et Environnemental doivent-ils jouer pour représenter nos territoires et la société civile ?
  • Faut-il les transformer et comment ?
  • Quelles évolutions souhaitez-vous pour rendre la participation citoyenne plus active, la démocratie plus participative ?
  • Faut-il associer davantage et directement des citoyens non élus, par exemple tirés au sort, à la décision publique ?
  • Faut-il accroître le recours aux référendums et qui doit en avoir l’initiative ?

8. L’immigration et l’intégration

  • Que proposez-vous pour améliorer l’intégration dans notre Nation ?
  • En matière d’immigration, une fois nos obligations d’asile remplies, souhaitez-vous que nous puissions nous fixer des objectifs annuels définis par le Parlement ?
  • Que proposez-vous afin de répondre à ce défi qui va durer ?

9. La laïcité

  • Comment renforcer les principes de la laïcité française, dans le rapport entre l’État et les religions de notre pays ?
  • Comment garantir le respect par tous de la compréhension réciproque et des valeurs intangibles de la République ?

Dès ce moment, Emmanuel Macron occupe le terrain. En 5 jours, il réunit par deux fois 600 maires de France. Il les a écouté calmement et longuement. Pendant 6h à chaque fois ! Une prouesse et une prestation qui s’est soldée par de vifs applaudissements de la part de l’assemblée plutôt frileuse à son arrivée. Face à ce tour de force, l’opposition et les gilets jaunes ne pouvaient que railler un « show » filmé et retransmis à la télévision : « le Président est en campagne » pour les uns, « 7 heures, c’est rien à côté des 24h de Cyril Hanouna ! » pour d’autres. Les uns comme les autres dénoncent l’omni-présence des caméras dans les débats… pourtant c’était ce que les gilets jaunes réclamaient à toute discussion avec un membre du gouvernement. Etrange revirement de situation…

« La maîtrise dont a fait preuve le président de la République six heures durant devant des maires ruraux, démontrant sa connaissance des dossiers et même sa capacité à écouter et ses qualités de pédagogue, risque de renforcer cette image : il est trop jeune et trop intelligent. Arrogant, en un mot… » déclare Dominique Schnapper, sociologue et politologue, sur le site francetvinfo.

Le succès du démarrage du grand débat national est insoutenable pour Eric Drouet, il doit reprendre la main coute que coute. Même si les gilets jaunes ont toujours déclaré qu’il n’y avait pas de meneur, ce dernier est le seul à rythmer le mouvement. Quelques « porte paroles » outsiders tirent leur épingle du jeu comme Priscilla Ludosky (qui tend la main au grand débat pour trouver une porte de sortie à la contestation) ou encore Maxime Nicolle (proche de cette dernière mais toujours opposé au grand débat) mais c’est bien Drouet le maître à bord.

Après l’acte X qui fut à l’identique de l’acte IX, Eric Drouet annonce la création des « Nuits Jaunes« , copier-coller du mouvement « Nuit Debout » qui avait agité Paris et d’autres grandes villes françaises en 2016.

L’objectif est de créer leur propre consultation pour répondre aux revendications citoyennes et non aux questions d’Emmanuel Macron. Il faut dire qu’à force de se disperser, les gilets jaunes ne savent plus vraiment quelles sont leurs revendications. A part crier la démission du gouvernement et réclamer la création du RIC, est-il encore quelque part question du pouvoir d’achat ? « Nous allons reprendre la liste des revendications que nous avions élaborées en décembre. (…) Nous verrons lesquelles sont les plus populaires » déclare–t-il ! Incroyable ne trouvez-vous pas ?

Pendant ce temps, le grand débat se poursuit avec plus de 600 rencontres programmées, Emmanuel Macron rencontre d’autres maires et même des gilets jaunes hors caméra cette fois-ci. Le Premier Ministre Edouard Philippe s’est également rendu à des débats à province. Marlène Schiappa, quant à elle, a préféré se rendre dans l’émission « Balance ton Post » pour un débat public de 3h au côté de Cyril Hanouna. Cette initiative a fait énormément parlé d’elle mais, à l’arrivée, le débat était constructif et a fait émerger 7 propositions :

  • TVA à 0% pour les produits de premières nécessités (26%)
  • Augmentation de 2 à 4% le budget des hôpitaux (11%)
  • Le retour de l’ISF (8%)
  • Réexamen des niches fiscales (7%)
  • Peine de prison pour les fraudeurs fiscaux (6%)
  • Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) réservé aux TPE et PME (6%)
  • Revoir les cycles horaires de la police (5%)

Dans les idées émises durant la soirée, on pourrait également retenir la création d’une brigade anti-discriminations, idée que la Ministre a particulièrement apprécié, ou encore un prix plancher pour les matières premières agricoles afin « de ne plus vendre à perte ».

ACTE XI

A peine 69 000 personnes ont battu le pavé le samedi 26 janvier 2019. Avec le décès du compositeur Michel Legrand et la rupture d’un barrage minier au Brésil, le compte-rendu sur cet 11ème samedi de manifestions n’aura été évoqué qu’en second voire troisième sujet sur France 2 et TF1. A l’opposé les chaînes d’info en continu ont poursuivi leurs directs et leurs nombreux débats.

La nuit jaune à la place de la République n’aura finalement pas lieu. Les heurts qui ont éclaté lors du rassemblement des diverses marches organisées en ordre dispersé dans Paris ont entraîné l’évacuation de la place. Parmi ces heurts, un marquera cette journée lorsqu’en plein direct Facebook, Jérôme Rodriguès tombe à terre après avoir reçu un tir dans l’œil droit. Régulièrement présent dans les médias et au côté d’Eric Drouet, Il réalise de nombreuses vidéos à succès depuis le début du mouvement dans lesquels il relaie notamment les invitations à manifester. Jérôme Rodriguès a travaillé dans le commerce pendant 20 ans et est actuellement en reconversion professionnelle pour être plombier.

Une nouvelle fois, Eric Drouet ne sera pas parvenu à organiser une action sans casse. Au contraire, à l’annonce de la blessure de son ami, il appelle dans un communiqué à « un soulèvement sans précédent par tous les moyens utiles et nécessaires ».

A l’opposé, de nombreux autres gilets jaunes se sont retrouvés sur des ronds-points ou ailleurs en province sans pour autant qu’on en parle dans les médias. Alors une question se pose : à force de mobiliser l’antenne, les portes voix auto-proclamées et les experts en tous genres ne cachent-ils pas les « vraies » gilets jaunes, ceux qui se battent pour leur pouvoir d’achat et non pour trouver un slogan pour samedi prochain ou pour réclamer la démission du gouvernement ?

Nombre de gilets jaunes par date

Le week-end du 26-27 janvier 2018, 80 000 personnes ont également manifestés dans toute la France pour une meilleure gestion du climat et 10 000 foulards rouges à Paris pour « défendre la démocratie et les institutions » face aux violences qui ont émaillé la crise des gilets jaunes. Si ces derniers n’ont pas le monopole des manifestations, il faut reconnaître que les deux marches citées ci-dessus n’ont été émaillées par aucun acte de violence ou de dégradation et donc, par aucune utilisation d’arme de dissuasion par les forces de police.

Par contre, la marche des foulards rouges a été infiltrée par des impostures qui ont tenté de discréditer le mouvement en se promenant avec des banderoles sur lesquelles on pouvait lire « Mon amie c’est la finance », «  »LBD mon amour » ou encore « Benalla Castaner » entouré de coeurs. Le site du huffington Post révèle qu’il s’agit de soutiens affichés aux gilets jaunes et, pire, le site d’information indique que la chaîne russe RT France, dont les gilets jaunes vantent les mérites de son indépendance rédactionnelle, a diffusé une interview d’un certain David, fervant partisan de l’Union européenne qui se prononçait en faveur d’un « Etat policier » pour réprimer les manifestations. Russia Today a finalement présenté ses excuses sur cette fake news. Qui a bien pu organiser tout ça ? On se le demande…

Actes XII et XIII

De semaine en semaine, c’est la même ritournelle. De son côté, Emmanuel Macron poursuit son Grand débat national et du leur, les gilets jaunes toujours aussi soutenus par la population française dans les sondages (77% « approuve le mouvement ») continuent à se réunir chaque samedi. Les chiffres sont en baisse : 58.600 le samedi 2 février 2019 pour l’acte XII et 51.400 le samedi 9 février 2019 pour l’acte XIII. Mais les violences sont toujours présentes : le samedi 9 février 2019, la résidence secondaire du président LREM de l’Assemblée nationale Richard Ferrand a été incendiée, des manifestants ont tenté de pénétrer dans le Palais Bourbon. Ils se sont attaqués à la devanture de l’Assemblée nationale entraînant une riposte des forces de l’ordre. Un manifestant a perdu plusieurs doigts à une main.

Evolution des manifestations

A partir du 29 décembre 2018, les gilets jaunes ont constitué un collectif (Le Nombre Jaune) pour compter au plus juste le nombre de manifestants. On constate – comme dans toutes manifestations – une différence entre les chiffres du Ministère de l’Intérieur et ceux des organisateurs mais, par contre, la courbe est identique pour les deux compteurs.

A l’opposé la manifestation syndicat CGT – gilets jaunes du mardi 5 février 2019 a rassemblé 300.000 personnes dans toute la France, sans aucune violence.

Pendant ce temps-là, la recherche d’une solution pour un meilleur pouvoir d’achat semble très loin des pensées d’Eric Drouet…

C’est la deuxième fois que je vous parle du journaliste Vincent Glad dans un dossier « gilets jaunes » car ce dernier est très actif sur Twitter pour suivre l’évolution du mouvement. Il relaie à foison les propos des leaders du mouvement, suit les manifestations et dénonce les agissements des forces de l’ordre. Mais qui est-il vraiment ? Journaliste pour Libération et Brain Magazine, il fut chroniqueur « star des réseaux sociaux » dans le « Grand Journal » de Canal+ entre 2012 et 2013. A cette époque, l’émission était co-animée par Michel Denisot et Daphné Bürki.

Il vient de sortir de l’ombre à cause du message de soutien, publié sur Facebook ce dimanche 10 février 2019, par Marlène Schiappa, secrétaire d’Etat en charge de l’Egalité femmes-hommes et de la lutte contre les discriminations, contre la Ligue du LOL. Créé par Vincent Glad, ce groupe Facebook à la fin des années 2000 est accusé aujourd’hui de cyber-harcèlement sur de nombreux.ses blogueur.se.s et journalistes. Parmi les personnalités, on peut citer Florence Porcel, Matthias Jambon-Puillet et Capucine Piot. La page était alimentée par une trentaine de personnes issues de rédactions parisiennes, du monde de la publicité ou de la communication. Parmi ceux-ci, David Doucet, actuel rédacteur en chef web du magazine Les Inrocks, qui a le 10 février 2019 présenté ses excuses dans un tweet dans lequel il salue cette « libération de la parole » qui « m’a surtout fait comprendre que je comptais parmi les bourreaux ». Vincent Glad fera de même, le même jour, en déclarant « C’était du trolling, on trouvait ça cool. Aujourd’hui, on considérerait ça comme du harcèlement« .

Pour tout savoir sur l’affaire « La ligue du LOL », cliquez ICI (article de la plateforme Checknews de Libération). Suite à la parution de cet article et aux remous qu’il a suscité, Vincent Glad et David Doucet ont été mis à pied par leurs dirigeants ainsi qu’un autre journaliste de Libération, Alexandre Hervaud. Daphné Bürki a, quant à elle, déclaré qu’elle comprenait mieux aujourd’hui pourquoi Vincent Glad lui répondait « laisse, ne porte pas plainte, ça ne sert à rien. Se faire troller, c’est la règle » lorsqu’elle lui demandait quoi faire face aux harcèlements et aux menaces de mort dont elle était victime sur Twitter.

Petit-à-petit, d’autres membres de la Ligue du LOL sont également mis à pied comme Renaud Loubert-Aledo, connu sur Twitter sous le pseudo ClaudeLoup (« Strategist » pour Publicis Consultants), Guillaume Ledit (journaliste pour le média en ligne Usbek & Rica), Sylvain Paley (chroniqueur pour la plateforme Qualiter), François-Luc Doyez (rédacteur en chef adjoint du web de Les Inrocks), … Christophe Carron, rédacteur en chef de « Slate », a simplement présenté ses excuses.

Ingérence italienne

Coté politique, l’Italie s’invite un peu plus dans le débat. Le 5 février 2019, Luigi Di Maio, le vice-Premier ministre italien, accompagné de son bras-droit Alessandro Di Batista, a passé la journée avec Christophe Chalençon, gilets jaunes connus des médias, et les candidats aux élections européennes de la liste RIC d’Ingrid Levavasseur. Le Ministère des Affaires étrangères français n’a pas du tout apprécié cette « nouvelle provocation (qui) n’est pas acceptable entre pays voisins et partenaires au sein de l’Union européenne ». Le Quai d’Orsay a décidé de rappeler son ambassadeur en Italie pour « des consultations » après une série de « déclarations outrancières » et « d’attaques » sans « précédent » de responsables italiens. Une première depuis… la seconde guerre mondiale !

Son ami est parfois son ennemi…

Christophe Chalençon, personnalité phare du mouvement des Gilets jaunes, en a fait le frais en donnant un entretien dans une émission politique « Piaazapulita » sur la chaîne italienne La 7. Ne pensant pas que la caméra et son micro continuaient à tourner, il a eu ses mots : « S’ils me mettent une balle dans la tête, Macron, il est passé à la guillotine ! Aujourd’hui, on est arrivé à un tel point de confrontation que s’ils m’abattent, il est mort aussi (…) S’ils en touchent un, on a des paramilitaires qui sont prêts à intervenir ! Ils veulent aussi faire tomber le pouvoir (…) Aujourd’hui, tout le monde est calme mais on est à la limite de la guerre civile. Soit il y a une solution politique très rapidement… parce que derrière il y a des gens qui sont prêts à intervenir de partout. »

Lire nos autres dossiers « Gilets Jaunes » :

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